Lymphocytes T et B régulateurs produisant de l’IL-24 dans l’endométriose

Introduction

L’endométriose est une maladie chronique caractérisée par la présence de tissu utérin en dehors de la cavité utérine, accompagnée d’une inflammation persistante. Cette condition affecte jusqu’à 10 % de la population féminine et jusqu’à 50 % des femmes infertiles. La pathogenèse de l’endométriose reste ambiguë, bien que l’hypothèse la plus largement acceptée soit celle de la menstruation rétrograde. Cette étude se concentre sur l’expression de l’IL-24 dans les lymphocytes T régulateurs (Tregs) et les sous-populations de lymphocytes B régulateurs (Bregs) chez les femmes atteintes d’endométriose par rapport aux femmes en bonne santé.

Méthodologie

Les pourcentages de Tregs, de cellules B10, de cellules B immatures et de plasmablastes produisant de l’IL-24 ont été mesurés dans le sang périphérique de femmes atteintes d’endométriose (n=24) et de femmes en bonne santé (n=24) à l’aide de la cytométrie en flux. Les échantillons de sang ont été stimulés avec du PMA et de l’ionomycine pour induire la production de cytokines.

Résultats

Nous avons observé une augmentation du pourcentage de Tregs produisant de l’IL-24 dans le groupe des femmes atteintes d’endométriose, en particulier aux stades III et IV de la maladie, par rapport aux témoins. Parmi les sous-populations de Bregs, les pourcentages de plasmablastes produisant de l’IL-24 étaient plus élevés dans le groupe endométriose, notamment au stade IV, par rapport aux femmes en bonne santé. En revanche, les pourcentages de cellules B immatures produisant de l’IL-24 étaient plus faibles dans le groupe endométriose que dans le groupe témoin.

Conclusions

Nous avons démontré pour la première fois que les Tregs et les Bregs sécrètent de l’IL-24 et que leurs pourcentages sont modifiés dans l’endométriose. La signification de cette sécrétion de cytokines par les cellules régulatrices reste incertaine, mais nous supposons que l’IL-24 pourrait renforcer l’activité immunosuppressive inappropriée des Tregs et des plasmablastes dans l’endométriose, facilitant ainsi l’implantation et la croissance des lésions endométriales en dehors de l’utérus.

Discussion

L’endométriose est accompagnée de douleurs pelviennes chroniques, de dyspareunie, de dysménorrhée et d’infertilité. Les réponses immunitaires anormales, en particulier la dysfonction des cellules immunitaires périphériques et de la cavité péritonéale qui sécrètent diverses cytokines, ont été associées au développement de l’endométriose. Les femmes souffrant d’endométriose présentent une inflammation systémique chronique, caractérisée par des cytokines pro-inflammatoires altérées (IL-1β, IL-6, IL-8, et TNF-α), des cytokines des cellules T (IL-12, IL-17, et IFN-γ), et des cytokines anti-inflammatoires comme l’IL-4 et l’IL-10.

Rôle de l’IL-24

L’IL-24, membre de la famille des cytokines IL-10, a été impliquée dans la suppression de la réponse immunitaire contre les fragments endométriosiques, contribuant ainsi au développement de l’endométriose. L’IL-24 fonctionne principalement comme une cytokine suppressive des tumeurs via plusieurs mécanismes, y compris l’inhibition de l’invasion, de la migration, de l’angiogenèse et de la métastase, l’induction de l’apoptose, l’élimination des cellules souches cancéreuses et la sensibilisation des cellules cancéreuses aux thérapies.

Implications Cliniques

Les cellules régulatrices jouent un rôle fondamental dans le développement de réponses immunitaires suppressives qui permettent aux fragments endométriosiques de croître ou de se propager en dehors de la cavité utérine. Parmi celles-ci, les Tregs et les Bregs sont des acteurs clés dans l’établissement de la tolérance au soi. Leurs capacités régulatrices sont liées à la sécrétion de cytokines inhibitrices, telles que l’IL-35, le TGF-bêta et l’IL-10, toutes dysrégulées dans l’endométriose.

Conclusion

En conclusion, nous avons montré que les cellules T régulatrices circulantes et certaines sous-populations de cellules B (plasmablastes, cellules B immatures et cellules B10) sécrètent de l’IL-24. Leurs pourcentages sont modifiés chez les femmes atteintes d’endométriose par rapport aux femmes en bonne santé. Nous spéculons que les cellules produisant de l’IL-24 avec un phénotype régulateur sont impliquées dans la pathogenèse de l’endométriose. La sécrétion d’IL-24 semble renforcer l’activité immunosuppressive inappropriée des Tregs et des plasmablastes dans l’endométriose, ce qui permet l’implantation et la croissance des lésions endométriales en dehors de l’utérus. Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour élucider le rôle exact des lymphocytes régulateurs produisant de l’IL-24 dans le développement et la progression de l’endométriose.

🔗 **Source:** https://www.frontiersin.org/journals/immunology/articles/10.3389/fimmu.2025.1582762/full