Introduction à la bactérie Yersinia pestis
La bactérie Yersinia pestis, responsable de la peste noire, a causé la mort de près de 50 millions de personnes au milieu du XIVe siècle. Elle a également été à l’origine d’une épidémie antérieure dans le bassin méditerranéen au VIe siècle après J.-C. Aujourd’hui, cette bactérie continue de circuler à faible niveau dans certaines régions des États-Unis, d’Afrique et d’Asie, se transmettant généralement aux humains par l’intermédiaire de puces infectées transportées par des rats ou d’autres rongeurs.
Une modification génétique qui change la donne
Une étude récente publiée dans la revue Science révèle qu’une petite modification génétique rend la bactérie Yersinia pestis moins mortelle, mais potentiellement plus transmissible. Cette découverte pourrait expliquer une propagation accrue de la maladie dans des populations plus petites. Ravneet Sidhu, paléogénéticienne à l’Université McMaster au Canada et co-auteure de l’étude, explique que certaines souches de Y. pestis présentaient des niveaux réduits du gène pla, associé à la gravité de la maladie, mais les raisons de cette réduction restaient floues jusqu’à présent.
Expériences sur les souris
Pour comprendre l’impact de cette modification génétique, l’équipe de chercheurs a infecté des souris avec des souches modernes de Y. pestis présentant des niveaux normaux de pla, des niveaux réduits ou une absence totale d’expression du gène. Lorsqu’elles étaient injectées sous la peau pour imiter la forme de peste affectant les ganglions lymphatiques, les souris infectées par la souche à pla réduit ont survécu presque deux jours de plus que celles infectées par la souche normale. La mortalité est passée de 100 % avec la souche normale à 85 % avec la souche à pla réduit. Cependant, lorsque les souris étaient infectées par voie intraveineuse ou nasale pour imiter des infections sanguines ou pulmonaires, la souche à pla réduit était aussi mortelle que la souche normale.
Analyse des génomes anciens et modernes
Les chercheurs ont également examiné les génomes de souches anciennes et modernes de Y. pestis pour déterminer la prévalence de la déplétion du gène pla. Entre 30 % et 50 % des souches anciennes, issues d’études précédemment publiées, montraient des signes de déplétion, tout comme trois souches modernes isolées d’un humain et de deux rats en 1994. En analysant les données génétiques de ces souches, les chercheurs ont découvert que la réduction était causée par la suppression d’une région de 2 100 paires de bases contenant le gène pla dans une partie du génome, et l’intégration d’une molécule d’ADN appelée plasmide portant le gène dans d’autres régions.
Hypothèses sur l’évolution de la bactérie
Sidhu et son équipe émettent l’hypothèse que la déplétion du gène pla s’est produite en raison des épidémies répétées de peste qui ont diminué la densité des populations de rongeurs. En augmentant le temps pendant lequel les rats étaient infectieux, cela leur aurait donné plus de temps pour se déplacer entre des populations fragmentées, augmentant ainsi les chances de propagation de la maladie.
🔗 **Fuente:** [Nature](https://www.nature.com/articles/d41586-025-01687-8)